Si vous suivez un peu les infos, vous savez que l’écriture inclusive est de nouveau au cœur des débats en France. Nous sommes en fin 2023 et le fait que cette évolution du langage soit de nouveau remise en question par les médias et le gouvernement lui-même prouve sa légitimité dans notre quotidien. Mais, au fait, c’est quoi, concrètement, l’écriture inclusive ? On revient sur les fondamentaux !
L’écriture inclusive : on fait le point
Définition
Lorsque l’on parle d’écriture inclusive, nous avons tendance à voir ceci : “cher·e·s lecteur·ice·s.” L’utilisation du point médian est, en effet, au centre de cette nouvelle forme d’écriture et c’est cet élément en particulier qui fait beaucoup parler de lui, finalement.
L’écriture inclusive, en réalité, c’est beaucoup plus que ça.
Avant tout, l’écriture inclusive est une écriture neutre, non genrée. Mais c’est aussi une écriture qui pense à tout le monde. Inclusif, ça veut dire “qui intègre une personne ou un groupe en mettant fin à leur exclusion” (Larousse). Ça ne comprend donc pas seulement les femmes, mais aussi toutes les personnes qui ne se définissent pas dans les genres hétéronormés. C’est pour cela, qu’en plus du point médian, de nombreuses formes d’écriture ont été imaginées : l’apostrophe, une police spécifique, l’ajout du féminin en plus du masculin (tous et toutes), l’utilisation de nouvelles terminaisons (æ, x, …) ou encore la démocratisation des termes épicènes (non genrés).
Et puis, l’écriture inclusive ne concerne pas que l’écriture. Évidemment, c’est un des grands piliers, mais créer du contenu inclusif signifie s’assurer que tout le monde puisse nous lire. Remplir les balises alternatives pour décrire les images pour les lecteurs d’écran. Travailler le contraste de ses images pour assurer sa lisibilité. Rendre l’ensemble de ses contenus accessibles à tous·tes. Utiliser les CamelCase (utiliser des majuscules pour les premières lettres des mots plutôt que des espaces) pour les hashtags.
Il existe plusieurs façon de rendre son contenu en ligne accessible et inclusif pour le plus grand nombre. Et que l’écriture inclusive, et plus précisément l’utilisation du point médian, soit encore un débat aujourd’hui n’est pas normal. Ne voulons-nous pas que nos proches se sentent concerné·e·s par ce que nous partageons ? Que nos proches puissent découvrir nos projets simplement ?
L’écriture inclusive est un outil formidable qui permet de réduire les discriminations.
Pourquoi l’écriture inclusive dérange ?
Retour sur la proposition de loi visant à protéger la langue française
En cette fin d’année, le 30 octobre 2023, le Sénat a voté une loi pour interdire l’écriture inclusive dans certains textes officiels et notamment dans l’enseignement. Le nom de cette proposition est la suivante : Protéger la langue française des dérives de l’écriture inclusive.
Selon le site du Sénat, l’écriture inclusive est un frein à la lecture et à la compréhension de l’écrit. Mais, surtout, “ils jugent que l’écriture inclusive constitue, plus généralement, une menace pour la langue française.” Leur solution est donc de proposer cette loi pour “proscrire l’usage de l’écriture inclusive dès lors que le droit exige l’usage du français.”
Voici notamment quelques mentions du fameux texte, toujours sur le site du Sénat :
“Le Sénat a notamment :
- précisé le champ des pratiques interdites, en y incluant les néologismes sur les mots grammaticaux (notamment les pronoms du type « iel ») ;
- sanctionné de nullité les actes juridiques qui contreviendraient à l’interdiction d’usage de l’écriture inclusive ;
- inclus dans l’interdiction d’écriture inclusive les publications émanant de personnes publiques ou de personnes privées chargées d’une mission de service public.”
Le masculin est-il neutre ?
En plus du fait que le Sénat et le gouvernement entier ne veut pas faire évoluer la langue en continuant de l’ancrer dans des traditions du XIXᵉ siècle (ils utilisent même le terme “dérive” qui est un mot très fort pour une pratique pacifique), il y a une mention qui nous chiffonne particulièrement. “Les pratiques rédactionnelles et typographiques visant à substituer à l’emploi du masculin, lorsqu’il est utilisé dans un sens générique, une graphie faisant ressortir l’existence d’une forme féminine ».”
Le voici donc le cœur du problème. Pour beaucoup encore le masculin est considéré comme neutre. Alors qu’il ne l’est pas. Et ça va au-delà de la simple règle grammaticale. Mais nous sommes en 2023. Les droits des femmes, et des personnes queers, sont chaque jour un peu plus en danger dans le monde. Et le gouvernement est encore en train de remettre en question une écriture qui évolue avec son temps, qui milite et qui inclut toutes ces personnes qu’il exclut.
Alors, oui, le point médian ou les terminaisons autres peuvent parfois troubler. Entre nous, les parenthèses sont-elles plus compréhensibles ? Il existe plein d’autres formes d’écriture inclusive que le point médian. Il est essentiel de les connaître pour utiliser celle qui nous convient le mieux.
L’écriture inclusive est un choix. Éthique. Militant. Politique. Mais elle reste un choix. Chacun et chacune d’entre nous a le droit de l’utiliser ou non. Et l’interdire dans certains cercles alors que beaucoup de personnes l’utilisent déjà au quotidien, c’est réduire au silence toutes ces voix qui s’expriment enfin. C’est légitimer le patriarcat et lui donner raison dans une société qui ne demande qu’à sortir de ces biais toxiques. C’est continuer d’attaquer l’évolution des mentalités et les opinions des minorités.
Le Labyrinthe de Théia : pour une littérature française plus inclusive
Vous le savez maintenant si vous nous suivez depuis nos balbutiements (et si vous avez bien lu cet article en entier), nous sommes pour une meilleure inclusivité dans la littérature française. Tous nos contenus sont inclusifs (ou tendent à l’être dans la mesure du possible). Nos auteurices ont le choix d’utiliser la forme d’écriture qui leur convient, qui leur parle et qui parlera à leur lectorat.
Nous voulons que la littérature de genre en France évolue et cette évolution passe, bien évidemment, par des choix aussi politisés que l’écriture inclusive.
Le fait que ce soit encore un débat aujourd’hui, et ses conséquences, nous montre qu’il y a encore de nombreuses mentalités à convaincre. Que les choses bougent, lentement, mais sûrement. Assez en tout cas pour faire réagir des personnes qui se croient encore au siècle dernier.
Nous n’avons jamais caché nos opinions, nos prises de position. Nous souhaitons un monde plus juste, plus équitable, plus accessible et respectueux de tous·tes. Nous souhaitons valoriser, sans commercialiser, nos auteurices queers et les récits de leurs héros et héroïnes queers, parce que ce sont nos valeurs.
C’est ce en quoi nous croyons.