Le droit d’auteur en maison d’édition, c’est un sacré sujet. Pas toujours bien compris ni même expliqué, il peut entraîner des problématiques entre l’auteur·ice et l’éditeur·ice. Alors, aujourd’hui, nous faisons le point ensemble pour vous donner toutes les informations essentielles à la bonne compréhension des droits d’auteurs, notamment au sein du Labyrinthe de Théia.
Qu’est-ce qu’un droit d’auteur en maison d’édition ?
Un petit rappel de la définition exacte du droit d’auteur, donnée par l’INPI.
“Le droit d’auteur protège les œuvres littéraires, notamment les créations graphiques, sonores ou audiovisuelles et plastiques, les créations musicales, mais aussi les logiciels, les créations de l’art appliqué, les créations de mode, etc. Les artistes-interprètes, les producteurs de vidéogrammes et de phonogrammes, et les entreprises de communication audiovisuelle ont également des droits voisins du droit d’auteur. Attention : le droit d’auteur ne protège pas les idées ou les concepts.”
Dans le cadre de la littérature, le droit d’auteur est défini dans le cadre de la Propriété Littéraire et Artistique, par le Code de la Propriété Intellectuelle (CPI). Il y est écrit :
« L’auteur d’une œuvre de l’esprit jouit sur cette œuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous. Ce droit comporte des attributs d’ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d’ordre patrimonial. » L’INPI ajoute : “Le droit d’auteur s’acquiert sans formalités, du fait même de la création de l’œuvre. Votre création est donc protégée à partir du jour où vous l’avez réalisée.”
Pour résumer, le droit d’auteur est ce qui permet à un·e auteur·ice de protéger son texte contre un éventuel plagiat ou une utilisation de son œuvre qu’iel n’aurait pas accepté.
La fanfiction, techniquement, est une violation des droits d’auteur, car l’on écrit à partir d’une œuvre qui existe déjà, et cela peut s’apparenter à du plagiat. En France, il est interdit de commercialiser une fanfiction, bien qu’elles puissent être publiées librement (sur Internet notamment) si l’auteur·ice de l’œuvre originale a accepté les fanfictions. Par exemple, il vous est impossible de publier des fanfictions sur l’univers du Trône de Fer, G.R.R. Martin ayant refusé toute fanfiction sur son œuvre.
Le droit d’auteur est aussi un revenu d’exploitation versé par l’éditeur·ice que perçoit l’auteur·ice suite à la vente de son œuvre. À une date précise, donnée obligatoirement dans le contrat d’édition, l’éditeur·ice verse le pourcentage qui revient à l’auteur·ice sur la vente de son livre.
Différence entre droits moraux et droits patrimoniaux
Il y a une idée reçue qui circule depuis toujours sur la cession des droits d’un·e auteur·ice sur son œuvre en maison d’édition. De nombreuses personnes pensent encore, à tort, que l’auteur·ice perd tous ses droits (moraux et patrimoniaux) dès qu’iel signe en maison d’édition. Or, ce n’est pas vrai !
Mais faisons d’abord une distinction entre droits patrimoniaux et droits moraux.
“Les droits patrimoniaux permettent à l’auteur ou à ses ayants droit (ses héritiers) d’exploiter son œuvre sous quelque forme que ce soit : ainsi, l’auteur peut décider de la reproduction et de la représentation publique de son œuvre et en tirer une rémunération.” (source : SACD.)
Le droit moral, quant à lui : “L’œuvre est le reflet de la personnalité de l’auteur : ce lien très fort qui existe entre l’auteur et sa création est donc protégé par le droit moral.” (source : SACD.)
La différence se place donc entre la création et son exploitation. Du coup, qu’est-ce que cède exactement l’auteur·ice ?
Qu’est-ce que l’auteur·ice cède concrètement ?
Les droits qui sont cédés sur une œuvre sont les droits patrimoniaux, les droits qui concernent la reproduction et l’exploitation. En aucun cas, les droits moraux sont cédés : l’auteur·ice reste maitre de sa création !
Prenons un exemple : vous signez un contrat d’édition avec une structure qui ne publie que du numérique. Vous cédez vos droits patrimoniaux (donc l’exploitation de votre oeuvre) seulement pour le format numérique. Cela ne vous empêche pas de publier vous-même la version papier.
Autre exemple : un·e auteur·ice françai·e touche des droits d’auteur par la maison d’édition chez qui iel a signé·e. À sa mort, ce sont ses héritier·ère·s qui toucheront les droits d’auteur. 70 ans plus tard, son œuvre tombe dans le domaine public. Même dans ce cas, l’auteur·ice ne perdra pas son droit moral : iel sera toujours l’auteur·ice de l’œuvre. En revanche, ses droits patrimoniaux seront dans le domaine public, tout le monde pourra avoir accès à ses droits patrimoniaux et aucun droit d’auteur ne sera reversé à la descendance.
L’auteur·ice est læ seul·e décisionnaire de ce qui advient de son œuvre.
C’est pour cela qu’il est primordial (nous vous le dirons jamais assez) de bien lire, relire et faire relire le contrat avant de le signer. Si une maison d’édition vous demande de céder vos droits moraux, fuyez.
Le droit d’auteur et le système d’à-valoir
C’est bon, pour le droit d’auteur, vous avez compris ? Bien. Nous allons passer à un autre sujet qui y est lié et qui est peut-être tout aussi complexe : l’à-valoir. Wikipédia en donne une définition plutôt claire et précise :
“Un à-valoir est un paiement partiel, à déduire de ce qui est dû. C'est donc équivalent à un acompte. Lorsqu'un auteur est payé en droits d'auteur, c'est-à-dire en pourcentage sur les ventes, les contrats d'édition de livre ou de production audiovisuelle mentionnent le plus souvent un tel à-valoir.”
De nombreuses maisons d’édition utilisent l’à-valoir, notamment les grosses structures, car il faut une trésorerie assez importante. Il faut le voir comme une avance sur les droits d’auteur : une somme est fournie à l’auteur·ice (souvent pendant la création de son oeuvre) et iel ne touchera rien d’autre tant que cette somme ne sera pas atteinte en droit d’auteur.
Un exemple concret ? Imaginons qu’une maison d’édition donne 1000 € brut d’à-valoir à un·e de ses auteur·ice·s (en net, cela fait un peu moins, car la maison d’édition précompte). Cette somme est perçue à la signature du contrat, en attendant la publication. Une fois le livre sorti, l’auteur·ice ne touchera rien tant que les 1000 € de droits d’auteur ne seront pas atteints. C’est aussi comme ça que l’auteur·ice peut se rendre compte du succès (ou non) de son roman. Actuallité précise : “Céline Curiol, romancière, rappelle que « l’à-valoir est important, car il constitue la somme perçue “a minima”, pour l’auteur ». Pour rappel, il s’agit d’une avance sur les droits d’auteur, déduite de ces derniers si leur montant lui est supérieur. L’auteure note cependant qu’il est descendu d’autour de 10.000 € à 7000 € pour son dernier ouvrage, vraisemblablement parce qu’il s’agissait d’un essai moins vendeur — c’est du moins la raison invoquée par l’éditeur.”
Pour Le Labyrinthe de Théia, du fait que nous soyons une toute petite structure, nous ne pratiquons pas d’à-valoir pour nos auteur·ice·s. C’est-à-dire que leur contrat ne prend en compte que le versement des droits d’auteur.
Le droit d’auteur en maison d’édition est un sujet souvent mal compris par les auteur·ice·s. Il nous semblait primordial de faire le point sur ce que l’auteur·ice cède et perçoit au titre de la signature d’un contrat.
Et enfin, pour terminer, n’oubliez jamais : lisez le contrat à tête reposée et faites attention aux clauses qui y sont renseignées.